Rapport d'évaluation de la situation politique des États-Unis d’Amérique : Décembre 2025
Le présent rapport vise à fournir une évaluation stratégique de l’évolution politique, institutionnelle, sociale et sécuritaire des États-Unis d’Amérique, ainsi que des implications pour l’autonomie stratégique de l’Union européenne. Compte tenu des transformations rapides que connaît l’environnement international, il est nécessaire pour l’Union d’apprécier la stabilité, la fiabilité et la capacité de projection de son partenaire traditionnel.
L’analyse qui suit ne constitue pas une remise en cause du partenariat transatlantique, mais une évaluation objective des dynamiques contemporaines affectant la gouvernance américaine et sa capacité à assumer un leadership global.
Les États-Unis traversent une phase de fragmentation politique profonde. La polarisation atteint un niveau sans équivalent dans les démocraties avancées. Le consensus bipartite, fondement de la stabilité institutionnelle américaine depuis 1945, s’est érodé au point de remettre en question la continuité de certaines politiques publiques fondamentales.
La défiance envers les institutions fédérales est structurelle. Les crises répétées autour des résultats électoraux de 2020 et 2024, ainsi que les tentatives d’instrumentalisation du pouvoir judiciaire et administratif, ont fragilisé la perception de l’État de droit. L’administration fédérale n’est plus unanimement reconnue comme garante du processus démocratique par une part significative de la population.
L'Europe observe également l’usage fréquent des ruptures budgétaires, menaces de défaut technique et blocages institutionnels, qui affaiblissent la capacité de Washington à assurer une planification stratégique cohérente.
Des préoccupations sérieuses émergent concernant la politisation de certaines institutions clés. Les déclarations et initiatives concernant le Department of Justice, les pressions sur les responsables judiciaires ou les tentatives d’utiliser les agences fédérales pour cibler des opposants politiques soulèvent des interrogations quant à la résilience démocratique américaine.
Le fonctionnement de l’État de droit, tel que reconnu et promu par les États-Unis sur la scène internationale, apparaît fragilisé par l’augmentation des attaques publiques contre les juges fédéraux, les procureurs et les organes de contrôle. Il existe un risque que ces dynamiques compromettent la crédibilité internationale de Washington dans la défense des normes démocratiques.
Le taux de violence interne demeure exceptionnellement élevé. Les États-Unis concentrent la quasi-totalité des fusillades de masse recensées dans les pays à revenu élevé. La circulation de plusieurs centaines de millions d’armes complique la gestion de l’ordre public et expose la société américaine à des risques systémiques.
La fragmentation communautaire s’accentue. Les fractures raciales, économiques, géographiques et culturelles atteignent un niveau qui limite de plus en plus la cohésion nationale. Les indicateurs sociaux, notamment en matière d’espérance de vie, de mortalité infantile et d’accès aux soins, reflètent une situation en régression par rapport à la plupart des pays européens.
Cette vulnérabilité interne constitue un facteur de fragilisation pour le rôle international de Washington.
L’écosystème médiatique américain est marqué par une polarisation extrême et une concentration d’acteurs privés disposant d’une influence politique sans équivalent dans l’Union européenne. L’utilisation stratégique des chaînes d’information en continu, la prolifération de contenus conspirationnistes et la dépendance croissante envers les plateformes numériques renforcent la désagrégation du débat public.
L’implication directe de personnalités économiques majeures dans la définition de l’agenda politique soulève des interrogations légitimes. La capacité d’un acteur privé à modifier l’accès aux infrastructures de communication, ou à peser de manière déterminante dans des débats diplomatiques sensibles, crée une vulnérabilité structurelle pour les alliés des États-Unis.
Le rapport observe que plusieurs acteurs américains non institutionnels interviennent régulièrement dans les affaires européennes. Certains responsables politiques ou membres de familles présidentielles, sans mandat officiel, se livrent à des campagnes hostiles visant des gouvernements européens, des institutions de l’Union ou des États partenaires. Des acteurs économiques influents, titulaires d’infrastructures numériques critiques, se permettent de formuler des injonctions directes à destination de dirigeants européens.
Ces pratiques s’écartent des normes d’ingérence entre partenaires stratégiques. Elles soulèvent des préoccupations croissantes concernant la capacité des États-Unis à respecter les processus politiques européens.
Les États-Unis demeurent une puissance militaire majeure. Toutefois, les débats internes relatifs à l’engagement international de Washington, les variations abruptes de doctrine d’une administration à l’autre et la remise en question régulière des garanties d’alliance interrogent la prévisibilité de la politique américaine.
L’Europe doit prendre acte du fait que la continuité stratégique américaine n’est plus un élément assuré. Cette instabilité doctrinale limite la capacité des partenaires européens à planifier dans un cadre transatlantique stable.
Bien que les États-Unis disposent d’atouts extraordinaires, plusieurs vulnérabilités apparaissent. La dépendance américaine envers des chaînes d’approvisionnement étrangères pour les médicaments, les composants électroniques, les batteries et les matériaux critiques demeure significative.
La dette publique américaine atteint un niveau qui soulève des questions sur la trajectoire budgétaire fédérale. Le système économique reste robuste, mais des déséquilibres structurels persistent. La concentration de la croissance dans quelques secteurs technologiques occulte une fragilité croissante des classes moyennes.
L’analyse des tendances américaines révèle une évolution significative. L’opinion publique américaine manifeste une réticence croissante envers les engagements internationaux lourds. Les alternances partisanes conduisent à des revirements stratégiques susceptibles d’affaiblir la crédibilité à long terme du rôle de Washington.
La perception internationale de l’influence américaine est affectée par ces dynamiques. L’Europe doit anticiper un environnement international où les États-Unis exerceront un leadership plus discontinu, davantage conditionné par les fluctuations de leur politique intérieure.
L’Union européenne demeure attachée au partenariat transatlantique. Cependant, l’évolution interne des États-Unis exige une réflexion sur la nécessité d’une autonomie stratégique renforcée dans les domaines de la défense, de la technologie, de l’énergie et de la sécurité économique.
Il est recommandé que l’Union développe davantage de capacités propres afin de garantir sa résilience face aux incertitudes de l’environnement américain. L’objectif n’est pas de se substituer au partenariat transatlantique, mais de consolider la capacité de l’Europe à agir en tant qu’entité autonome lorsque la stabilité ou la fiabilité des engagements américains n’est pas assurée.
L’analyse des dynamiques internes américaines met en lumière un ensemble de fragilités structurelles susceptibles de modifier durablement le rôle de Washington dans l’ordre international. L’Union européenne ne remet pas en question la valeur fondamentale du partenariat transatlantique, mais doit reconnaître que la trajectoire récente des États-Unis s’accompagne d’incertitudes qui appellent à une évaluation lucide et à un renforcement de l’autonomie stratégique européenne.